News Une coopérative piscicole à la rescousse des jeunes en situation de chômage

La Coopérative Piscicole de Multiplication et de Commercialisation du Poisson (COPIMUCOPO) est renommée pour sa détermination à résorber le déficit en poissons. Pour preuve, la production annuelle de poissons est passée de 1,2 tonne à 12 000 tonnes entre 2014 et 2018. En une seule année, la coopérative a dégagé une marge bénéficiaire de 36 millions de FBu. Elle a déjà créé 500 emplois dont la majorité est occupée par les jeunes.

 

Concerned URL http://burundi-eco.com/une-cooperative-piscicole-a-la-rescousse-des-jeunes-en-situation-de-chomage/#.W8beSmlR3b0
Source Burundi Eco
Release date 17/10/2018
Contributor Liévin Ndayizeye
Geographical coverage Burundi
Keywords biodiversité, emploi, pisciculture

Le projet d’élevage des poissons a été initié par sept jeunes diplômés en mai 2014. M. Cyriaque Ndayiragije, président de la COPIMUCOPO justifie sa motivation à se lancer dans la pisciculture: « Les poissons du lac Tanganyika nous parvenaient souvent en mauvais état. C’est pourquoi nous avons initié ce projet pour non seulement répondre à cette problématique, mais aussi créer de l’emploi », dit-il.

Les initiateurs du projet ont aménagé eux-mêmes les 5 étangs que comptait ce projet. «Les gens nous prennent pour des fous en nous voyant creuser. Mais par après, d’autres jeunes ont fini par comprendre et se sont joints à nous», se rappelle M. Ndayiragije. La petite association a évolué vers une coopérative. Actuellement, la coopérative compte 450 membres avec 50 actionnaires (23 femmes et 27 hommes).

La production croît de façon exponentielle

D’après Ndayiragije, la coopérative multiplie deux espèces, à savoir : le clarias (isomvyi) et les tilapias (ingege). Ces deux espèces ont été choisies parce qu’elles croissent vite et s’adaptent facilement aux conditions climatiques de la région. De plus, elles sont faciles à nourrir car elles ingèrent presque tout.

La coopérative a débuté avec seulement 5 étangs piscicoles mais, actuellement, l’effectif atteint 50 étangs piscicoles établis à Musenyi et à Randa en province Bubanza. Ce qui a porté la production annuelle de poissons de 1,2 tonne à 12 000 tonnes entre 2014 et 2018. Pour les alevins (petits poissons), la production annuelle est passée de 12 000 tonnes à 250 000 tonnes d’alevins au cours des quatre dernières années.

La coopérative génère des profits

Sur le marché, les poissons de COPIMUCOPO sont appréciés. « Auparavant, les consommateurs étaient réticents. Ils préféraient les poissons pêchés dans le Lac Tanganyika.  Petit à petit ils ont fini par apprécier nos produits », précise M. Ndayiragije.

Pour la récente production, la coopérative a dégagé une marge bénéficiaire de 36 millions de FBu pour la vente de ces poissons. «Nous avons vendu 12 000 tonnes de poissons à 60 millions de FBu et 240 000 tonnes d’alevins à 24 millions de FBu. Les recettes cumulées s’élèvent à 84 millions de FBu. En déduisant les dépenses, on reste avec une marge bénéficiaire de 36 millions de FBu», fait savoir le président de la COPIMUCOPO.  Nos principaux clients sont les grossistes qui proviennent de la ville de Bujumbura, la population locale ainsi que la FAO et le FIDA pour l’achat des alevins.

L’offre reste inférieure à la demande

Malgré une meilleure production de poissons, l’aquaculteur Ndayiragije reconnaît qu’il y a encore du chemin à faire pour satisfaire la demande. L’annuaire des statistiques agricoles dresse une courbe descendante de la production. Elle est passée de 77 165 tonnes de poissons à 27 706 tonnes de poissons entre 2004 et 2016. Paradoxalement, la demande ne cesse d’augmenter en même temps que l’offre est en chute libre.

Pour une population de près de 12 millions d’habitants, la consommation annuelle est d’environ 1,3 kg de poissons par personne. Par contre, Ndayiragije citant la branche des Nations Unies en charge de l’alimentation et de l’agriculture estime à 8,3 kg la consommation annuelle de poissons par personne en Afrique et 16 kg au niveau mondial.  Le Burundi est en deçà de la moyenne africaine. C’est pourquoi Ndayiragije invite les autres jeunes à se lancer dans la pisciculture qui reste un secteur sous exploité au Burundi. Il encourage d’autres jeunes à lui emboiter leur pas. La coopérative met à la disposition des jeunes qui ont déjà des étangs bien aménagés des alevins. « En plus des formations, nous avançons des alevins aux jeunes entrepreneurs qu’ils rembourseront après la pêche », souligne M. Ndayiragije.

L’absence d’une écloserie entrave l’épanouissement de la coopérative

Tout n’est pas rose à la COPIMUCOPO. Le président de la coopérative dénonce l’incompréhension de certains membres qui hésitent à pratiquer les techniques piscicoles modernes et surtout ignorent l’intérêt de la pisciculture. L’autre défi est lié au manque d’espace de pré-grossissement des poissons. La coopérative se contente d’un incubateur artificiel fabriqué avec les moyens de bord (moustiquaire tendue à la surface de l’eau). Ce qui affecte le rendement annuel oscille entre 3 et 3,5 tonnes de poissons par hectare alors que dans d’autres pays le rendement annuel est de 8 tonnes de poissons par hectare.

Ndayiragije déplore également l’absence d’unités de transformations d’aliments industriels pour les poissons. «Dans d’autres pays comme l’Ouganda qui a investi dans le secteur piscicole, on trouve un peu partout les aliments des poissons», indique-t-il. La coopérative teste l’association de la pisciculture à l’élevage des poules. Un poulailler a été installé au-dessus de l’un de nos étangs. La majorité des fientes et des restes de nourriture tombent directement dans l’eau et nourrissent les poissons, explique M. Ndayiragije.

Dans tous les cas, la coopérative piscicole reste engagée à promouvoir les activités piscicoles à travers le pays. Nous allons continuer à multiplier les étangs. Ce qui va générer des revenus des revenus supplémentaires pour acheter un incubateur moderne et des machines pour la transformation des aliments. La coopérative espère lever des fonds de la part des partenaires comme la FAO qui a promis de soutenir ses activités. « En plus des formations, la FAO a promis de mobiliser des fonds pour soutenir le projet », se réjouit M. Ndayiragije.

A la découverte de la pisciculture

L’élevage des poissons est trop exigeant. L’espace piscicole doit être à proximité de la route et préférentiellement dans une zone aride, explique M. Ndayiragije.  Un bon aquaculteur doit cibler une région où il y a des amateurs du poisson. L’étape suivante consiste en la préparation des étangs. Généralement, on creuse un étang de 20 m sur 40 m. Après avoir creusé les étangs, on y ajoute de la chaux agricole pour diminuer l’acidité du sol qui pourrait nuire à la croissance des poissons.

L’autre étape cruciale consiste à connecter l’étang à une source d’eau. Ce qui ouvre la voie à la phase de préparation d’un environnement favorable aux poissons. L’empoissonnement interviendra après la culture des phytoplanctons. Ces derniers sont des organismes végétaux vivant en suspension dans l’eau. Pour stimuler leur croissance, on utilise la fumure organique telle que les fientes de poule. La coloration verte des eaux témoigne de leur abondance.

Les phytoplanctons serviront de nourriture aux poissons, surtout en jeune âge. La technique pour empoissonner votre étang consiste à mettre des semences dans les étangs à raison de 5 alevins par m2. Il ne restera qu’à suivre de près l’alimentation des poissons. Ceux-ci sont nourris deux fois par jour et comme les aliments spécifiques ne sont pas disponibles, on mélange la farine au son de riz, au soja, aux restes de fretins (dits Mwanza).

Le cas emblématique des jeunes de Bubanza devrait inspirer d’autres jeunes surtout dans un pays comme le Burundi où le chômage, la pauvreté et l’insécurité alimentaire gagnent du terrain. Pourtant, le pays dispose d’un réseau hydrographique très dense et il pleut 9 mois l’année.

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